Actusf : Haute École vient d’être réédité en poche aux éditions L’Atalante. Quelle a été l’idée à l’origine de ce roman ?
Sylvie Denis : Si ma mémoire est bonne, je m'étais fait la remarque que bien souvent dans les univers de fantasy où la magie existe, les magiciens sont mal considérés, ou même persécutés. Et je m'étais dit que si j'étais au pouvoir, je ne me contenterais pas de les mettre au ban de la société : j'utiliserais leurs capacités pour mes propres buts. C'est ainsi que j'ai progressivement bâti ce monde qui ressemble plus ou moins à notre 18 ème siècle, mais où les magiciens sont réquisitionnés par le pouvoir qui les forme dans la Haute-École qui lui donne son titre. Tout le reste est parti de là : la Haute-École, ses professeurs, les Chasseurs qui parcourent le pays pour retrouver ceux qui veulent y échapper, les magiciens opposés à son existence…
Actusf : Vous avez créé de nombreux personnages, dont Arik, le courtisan, Madge, l’espionne, le diabolique Hérus Tork, sans oublier Raoul des Crapauds et Ian. Comment les avez-vous créé ? Ont-ils suivis la route que vous leurs aviez tracé ou vous ont-ils surpris ?
Sylvie Denis : Si ma mémoire est bonne, j'avais commencé une nouvelle dont les deux personnages principaux étaient Arielle et Ian, qui tentaient de fuir le village où ils avaient toujours vécu. J'avais cette scène où ils recréaient une pièce avec un feu de cheminée dans un paysage d'hiver, je ne me souviens pas de grand-chose de plus et je ne pense pas avoir gardé le texte (il est peut-être au fond d'un carton mais je ne garantis rien). À partir de là, il fallait que j'invente ce monde où ces deux gamins se retrouvaient obligés de fuir ou être rattrapés par les Chasseurs. Tout ça sur de longues années, parce que je travaille la plupart du temps sur plusieurs projets en alternance.
Actusf : Quelques années sont passées depuis l’écriture de ce roman. Maintenant, avec le recul, aimeriez-vous changer des choses ? Procéderiez-vous différemment ?
Sylvie Denis : J'écrirais une série. Qui aurait suivit des élèves de l'école année après année. Et qui aurait eu beaucoup de lecteurs et m'aurait rendue millionnaire.
Non, sans rire, on évolue nécessairement, donc on voudrait toujours avoir fait autrement, mais bon, on sait ce qu'il en est, hein ?
L'idée de base, je l'ai eue en 1988 ou 89, la fantasy n'existait quasiment pas en France, Mnémos n'existait pas, Bragelonne encore moins, L'Atalante commençait tout juste. Concevoir une série de fantasy à l'époque, c'était tellement peu réaliste, surtout pour quelqu'un qui fonctionne mieux sur des formats courts, que je n'y ai pas pensé du tout.
Peut-être aurais-je aimé savoir que je voudrais rester avec ces personnages que j'aime beaucoup. Je l'ai fait en écrivant la suite, j'ai 600 000 signes de texte à retravailler, et sans doute 300 000 de plus à écrire, mais j'ai un autre projet qui doit passer avant.