Un roman qui résonne douloureusement avec l’actualité que nous vivons depuis des mois. Il s’intitule Appartement 816, et il est signé Olivier Bordaçarre, comédien de théâtre, scénariste et romancier. C’est, en fait, le journal d’un enfermement…
Un homme écrit pour raconter son expérience. Il est coincé depuis des mois dans un appartement où il habite avec sa femme, son fils et leur chien.
Il écrit sur les murs, sur les meubles, sur les portes, au fond des penderies, dans les tiroirs de la cuisine, partout. Avec des feutres indélébiles à pointe fine.
Bientôt ses pattes de mouche couvrent tout l’espace, comme une immense toile d’araignée. Il vit à l’intérieur de son histoire, prisonnier de lui-même.
Pour s’en dégager, il envisage de recopier ce texte sur le réseau social agréé par le gouvernement qui incite vivement les citoyens à partager leur expérience de l’isolement auquel ils sont contraints.
Et cet isolement est dû à une pandémie qui n’en finit pas…
Elle dure depuis des années, sans cesse renouvelée par des mutations virales. Nous sommes en 2030 et ça continue de plus belle. Olivier Bordaçarre prolonge les lignes de force de la situation actuelle, imagine ce qui pourrait advenir. Et le tableau est glaçant.
Depuis plusieurs mois, le pays est soumis à une PIG, une Période d’Isolement Général.
Les contraintes sont drastiques. Interdiction de sortir de chez soi. Livraison des provisions indispensables par les fenêtres des immeubles au moyen de monte-charges. Pointage quotidien des citoyens soumis à l’envoi par internet d’une Fiche Journalière de Présence. Test virologique hebdomadaire à poster sur un site dédié etc.
La surveillance est constante et généralisée, assurée par des drones qui contrôlent même l’ouverture des fenêtres autorisée quelques minutes par jour à des horaires bien précis.
Et tout cela est vu à travers les yeux du narrateur, l’auteur du journal…
Un type lambda, il s’appelle Didier Martin, 41 ans. Il est comptable. Rigide, carré, il aime les cadres et les cases bien rangées.
Martin est soumis à l’autorité, il respecte les règles qu’il ne remet jamais en cause. Il incarne une forme d’obéissance aveugle, c’est un soldat résigné toujours du côté des Forces de l’Ordre. Il approuve la répression violente des émeutes et des manifs, les sanctions sévères au moindre pas de côté.
Olivier Bordaçarre lui a composé une voix sèche, sans affect, en équilibre fragile entre dépression et dynamisme. Le texte court, rapide et glaçant, comme en témoigne ce passage…
Un personnage très antipathique…
Très vite, on devine un drame. Que s’est-il passé dans l’appartement 816 ? L’auteur sait faire monter l’angoisse, au fur et à mesure que se révèle la folie du narrateur et la noirceur de l’histoire.
Martin est un produit monstrueux de l’enfermement qui lui a été imposé. Le rejeton d’une société de contrôle de plus en plus inhumaine et autoritaire où toutes les libertés ont été sacrifiées au nom de la sécurité.
Bien sûr, il s’agit d’une fable, particulièrement sombre. L’humour, quand il pointe parfois, est très noir. L’auteur invite le lecteur à s’interroger. Un fable donc, mais aussi une alerte.