Une leçon d’humilité de 135 pages.
Comment on décrit une telle expérience littéraire sublime ? D’abord, on sait qui est Becky Chambers : un nom frais et percutant de la Science-Fiction qui bouleverse les codes et dont on entend pas mal parler. Eh bien, c’est vrai. C’est tellement vrai que j’écris cette chronique complètement à chaud. Si on me disait, ces pages sont réelles, tu viens de lire un journal intime (et donc vulgarisé) d’astronome. Je dis oui. Je signe les yeux fermés.
C’est limpide. C’est plus que limpide, c’est plausible et millimétré. On a l’habitude de ces voyages dans l’espace, des space-opéras classiques à certaines SF queer féministe, mais ils sont pour la plupart incohérent, inexacte. Il faut accepter la magie de la chance. Ici, il n’y a pas de ça. Pas de hasard, pas d’inexactitude. Tout est cohérent et terre à terre, tout est pensé avec de réelles hypothèses menées actuellement par les chercheurs. Tout est expliqué, analysé, décortiqué (si simplement, ça rentre en 135 pages !) Par exemple : comment, dans ces voyages à des années-lumière, le corps vieilli, s’adapte, pèse…
Tant et si bien qu’on a l’impression que tout est vrai. On a l’impression qu’on lit réellement ce journal intime d’astronaute. Entre le rapport scientifique – mais absolument pas jargonneux car adresser à ces terriens restés sur la planète, même si ces derniers ne sont pas spécialistes – et, bien qu’elle déroule aussi les évènements de l’intime, il n’y a jamais de drama inutile, de mélo superflu, d’aventures improbables, de rebondissements grossiers… C’est seulement la meilleure œuvre de science-fiction, dépouillée, humble, plausible… Réelle ?
J’avais réellement l’impression de lire son journal/rappel, dénué de mise en scène. Tout étant si naturel, de l’écrit aux réactions banalement humaines, sans avoir besoin d’en rajouter. C’est de l’observation du monde (des mondes !), une mise en abîme de l’anthropologie et de l’étude des écosystèmes.
J’ai fini avec des frissons.