Avis de Naka and books
Le Caire, 1912.
L'histoire se déroule dans un monde uchronique dans lequel l'Égypte fait désormais partie des grandes puissances mondiales, notamment grâce à l'arrivée des djinns, de puissants êtres magiques, qui ont aidé le peuple égyptien à se débarrasser des colons anglais. Ces djinns sont apparus grâce au mystérieux Al-Jahiz, révéré comme un dieu. Fatma, unique femme au ministère de l'alchimie, des enchantements et des entités surnaturelles, est chargée de résoudre un meurtre, qui nous amène à en apprendre plus sur cette légende vivante et ses origines, mais aussi sur le fonctionnement et les transformations récentes de cette Égypte libérée du joug colonialiste.
L'auteur nous présente un éventail de personnages hauts en couleur et de femmes fortes, le tout enveloppé dans une ambiance arabisante marquée qui est encore trop peu mise en avant en fantasy, ce qui confère son originalité au roman. Dépaysement garanti !
Pour les personnes qui se demandent si elles peuvent lire le roman sans avoir lu les nouvelles : oui, sans aucun problème, tout y est bien expliqué de façon à se suffire à lui-même. Attention toutefois : le roman révèle la fin d'une des nouvelles ainsi que d'autres éléments, alors pour les personnes qui auraient l'intention de lire les nouvelles ET le roman, il est effectivement conseillé de les lire dans leur ordre de parution afin de ne pas gâcher le plaisir de la découverte.
Pour ma part, j'ai vraiment aimé découvrir cette Égypte puissante, dans laquelle on est immergé(e)s tant par le vocabulaire utilisé que par les descriptions riches et détaillées. J'ai évidemment adoré Fatma, personnage atypique au caractère bien trempé, ainsi que sa relation mouvementée avec sa toute nouvelle partenaire. L'auteur maîtrise son sujet et son histoire, et ça se voit ! En trame de fond, il aborde également des sujets d'actualité comme le vote des femmes, la liberté d'être soi-même, les inégalités sociales ou encore la représentation des femmes dans le monde du travail. On aperçoit d'ailleurs entre les lignes une critique de notre société actuelle.
La plume est riche tout en restant fluide grâce au super travail de traduction qu'il est important de souligner.
En bref, si vous souhaitez partir mener l'enquête dans un monde rempli de djinns et de magie, ce roman est pour vous !
Avis de Florent
L’auteur P. Djèlí Clark vous dit-il quelque chose ? Peut-être pas encore, pourtant cet auteur américain semble être apprécié Outre-Atlantique, plusieurs de ces novellas ayant été primées par de prestigieux prix littéraires de l’imaginaire tel que Nebulaou Locus. De quoi rendre curieux, non ?
Le Maître des djinns est son premier roman et aussi ma première découverte de cet auteur traduit depuis peu en France par L’Atalante. Si cette histoire peut se lire indépendamment, pour les plus soucieux d’entre vous au respect de la chronologie, sachez que ses novellas L’Étrange affaire du djinn du Caire puis Le Mystère du tramway hanté précèdent les évènements se déroulant dans ce roman.
Deux petits textes que je prendrai plaisir à découvrir prochainement ayant passé un chouette moment de lecture avec Le Maître des djinns. Une plongée dans une Égypte uchronique où l’apparition des djinns et autres créatures magiques a bouleversé l’ordre du monde. L’histoire se déroule en 1912, une cinquantaine d’années après qu’un mystérieux soudanais nommé al-Jahiz enseigne au Caire l’alchimie et les “arts oubliés” dont les travaux ont abouti par l’ouverture d’une brève dans “le Kaf”, un passage vers un autre monde qui fut suivi par l’apparition des premiers djinns dans le nôtre.Une apparition faisant au fil du temps de l’Égypte une grande puissance libérée de sa tutelle britannique et à la pointe de la modernité. Modernité technologique avec des robots domestiques mais aussi sociale, l’apparition des djinns ayant eu pour conséquence une mutation sociale dans le pays. Il y aurait beaucoup de choses à dire sur ce cadre travaillé par l’auteur. Un cadre bien pensé, bien exploité, qui constitue indéniablement l’un des points forts dece roman.
C’est une lecture qui est dépaysante et qui permet de sortir des sentiers battus de la fantasy occidentale auxquels je suis habitué. Lire Le Maître des djinns c’est aussi se plonger dans la mégalopole que constitue Le Caire, dans une culture, un folklore et une mythologie que pour ma part ne connaissait pas. C’est une découverte qui fut vraiment très appréciable.
Vous l’aurez sans doute remarqué, je n’ai toujours pas parlé de l’intrigue : il est difficile ici de trop en dire ici vu que l’on suit une intrigue policière. En effet, notre personnage principale, l’agente Fatma el-Sha’arawi du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles se voit confier l’enquête de l’assassinat collectif de la Fraternité d’al-Jahiz par un homme mystérieux se disant être le fameux al-Jahiz lui-même... C’est une intrigue qui prend son temps, et c’est ici le seul véritable reproche que je peux faire sur ce roman. L’intrigue prend vraiment plus d’une centaine de pages avant de démarrer. Cela s’explique bien sûr par la richesse du cadre de l’histoire mais dont la présentation se fait un peu, je trouve, au début du roman au détriment de l’avancée de l’intrigue. Une fois que celle-ci est bien démarrée, cependant l’auteur conserve habilement un rythme agréable avec des passages d’actions fort sympathiques, des révélations surprenantes pour arriver à un dénouement qui s’avère plus que correct. J’espère que l’auteur écrira d’autres romans dans la continuité de ce dernier car il y a ici véritablement matière à faire encore de très chouettes histoires.
Avec un cadre aussi travaillé que dépaysant, une intrigue policière qui se révèle plaisante à suivre, une héroïne qui n’a pas froid aux yeux, une plume agréable, quelques touches d’humour, de l’action et des rebondissements Maître des Djinns s’est révélé être une sympathique lecture que je ne peux que vous recommander.
Publié le 16 mars 2022