On la surnomme Méduse depuis si longtemps qu'elle en a oublié son véritable prénom. Elle marche tête baissée, le visage caché derrière ses cheveux, pour épargner aux autres la vue de ses Difformités. Elle-même n'a jamais osé se regarder dans un miroir. Placée dans un institut pour jeunes filles à la merci d'adultes peu scrupuleux, Méduse n'a de cesse d'accéder à la bibliothèque des lieux, seul moyen pour elle de s'ouvrir à la connaissance du monde. À force de ruse et de prise de conscience des pouvoirs de ses globes oculaires, qu'elle se garde longtemps de dévoiler, elle nous entraîne dans sa croisade contre l'oppression et la honte du corps. Roman d'apprentissage, roman gothique féministe, conte cruel ? Méduse est tout ça à la fois, et surtout un ouvrage tellement finement brodé littérairement qu'on ne peut en manquer un mot ni un propos : Martine Desjardins, tout autant que Méduse, nous prend dans ses filaments.
Comment dire que ce livre est percutant, vous ne le lâcherez pas pendant la lecture et il vous restera encore après l'avoir terminé.
L'histoire, racontée par Méduse à la première personne, se passe à une époque indéterminée, mais que l'on situe à peu près pendant la première moitié du vingtième siècle. L'ambiance a quelque chose de gothique, qui flirte un peu avec l'horreur et qui dérange un peu.
Le style d'écriture, qui joue avec la poésie et les métaphores est très bien travaillé.
Le point fort est le sujet du corps, elle montre les effets de la honte du corps, de l'oppression, du regard des autres, qui finalement a si peu d'importance.