Après le Clairvoyage et La Brume des Jours, Anne Fakhouri délaisse pour un temps la littérature jeunesse, mais poursuit son chemin dans le monde de l’enfance et des peurs cachées. Sur fond de secrets de famille, elle aborde des thèmes difficiles tels que l’abandon, le déni de grossesse et l’infanticide.
Ces drames donnent vie à une sombre créature: le marchand de sable. Loin du personnage amical des contes et de Bonne nuit les petits qui laisse tomber du sable sur les yeux des enfants pour les endormir, le personnage de Narcogenèse est une sorte de Freddy Krueger qui s’attaque aux dormeurs dés que ceux-ci ont passé le seuil du monde des rêves. Il aime avant tout terroriser, faire monter la peur et la souffrance avant de détruire l’âme de sa proie.
Sous couvert d’une enquête policière lancée par l’oncle d’un des enfants disparus, le lecteur est baladé de protagonistes en protagonistes, partagé entre les non-dits et les souvenirs. Plusieurs personnages se partagent en effet la narration, et chacun d’eux va apporter une pièce au puzzle complexe de ce tueur en série onirique. Oscillant entre thriller et fantastique, Narcogenèse retrace une grande fresque familiale noire et complexe où chaque personnage apporte sa voix, sa vision: de l’innocence de l’enfant, à l’incrédulité de l’adulte en passant par le savoir de la grand-mère, le lecteur passe d’un point de vu à l’autre et ne comprend la menace qu’une fois avoir écouté tous les témoignages. Pas vraiment de héros dans cette histoire, différentes générations d’hommes et femmes s’y succèdent, impliquées de façon plus ou moins importante.
Toutefois, Anne Fakhouri maîtrise parfaitement le fil de son histoire et je ne me suis sentie à aucun moment perdue: on se laisse porter par l’intrigue, enfermé dans l’angoisse qu’éprouve les différents interprètes. C’est un conte noir, très noir, où le danger peut surgir dés que vous fermez les yeux … Don’t blink !