Le monde des réseaux métropolitains exerce une sorte de fascination pour certains. Entre l’inconnu des mondes souterrains, les stations fantômes dans certaines villes ou les légendes urbaines que l’on se raconte de génération en génération, la matière est là pour celui qui veut créer une œuvre sur ce sujet. Le réseau de Moscou, entre tunnels profonds, stations magnifiques et rumeurs d’existence de lignes secrètes réservées aux anciens dirigeants soviétiques, a offert à l’écrivain russe Dmitry Glukhovsky une matière de premier choix pour créer son premier roman, Metro 2033.
Le roman prend place en 2033. Cela fait vingt ans qu’une guerre nucléaire totale a ravagé l’ensemble du globe, rendant la surface invivable pour l’homme. Juste avant que les missiles ne frappent Moscou, une poignée d’habitants réussit à se réfugier dans les stations du métro, conçues pour résister aux bombes, avec l’espoir d’en sortir au plus vite. Cependant, il devient clair que personne ne pourra retourner vivre à l’air libre. Alors, les survivants décident de rester dans le métro moscovite et d’y organiser définitivement leur vie. Pendant vingt ans, des clans et des confédérations se forment et se livrent des guerres. Quatre factions se détachent plus que d’autres : Polis, « dernier bastion de la civilisation », qui couvre la grande station d’interconnexion Alexandrovski Sad – Biblioteka Imeni Lenina, la ligne Rouge qui reprend une grande partie de l’ancienne ligne 1 et qui est aux mains d’une idéologie totalitaire stalinienne, le Quatrième Reich continuation idéologique du troisième et dont la base se trouve à la station d’interconnexion Tchekovskaïa. Enfin, la confédération de la Hanse, confédération marchande qui a pris la possession de toute la ligne circulaire ceinturant le centre du réseau. A côté de ces quatre Grands, d’autres alliances se sont timidement formées alors que certaines stations ont choisi de rester indépendantes.
Artyom, le héros de l’histoire, vit avec son père adoptif dans VDNDh, station indépendante située au nord du réseau qui possède néanmoins des liens forts avec quelques stations voisines. Dernière station habitée de la ligne où elle est située, elle doit faire face à un grave problème. Des hordes de mutants essayent de rentrer en force dans le métro pour ravager toute vie encore existante. Si VDNKh a réussi jusque-là à contenir les assauts, il est de plus en plus difficile de tenir. C’est à ce moment qu’arrive à la station Hunter un stalker ami du père adoptif d’Artyom. Ce dernier doit remonter à la surface et charge d’une mission Artyom : s’il ne revient pas d’en haut cette fois-ci, il lui faudra aller à Polis et trouver un certain Melnik, afin de lui demander de l’aide. Après quelques jours, Hunter n’est toujours pas revenu, Artyom commence alors son voyage vers Polis, loin de se douter des contretemps qui l’attendent.
Finalement, l’histoire est très secondaire dans Metro 2033. Le principe d’un héros qui part pour une mission n’a rien d’original et le concept d’un voyage initiatique (ce qu’est la mission d’Artyom, finalement) a été de nombreuses fois exploité. Ce n’est pas dans ce secteur qu’il faut chercher l’intérêt du titre, mais bel et bien dans sa description d’une humanité parquée dans le métro. Et cette description est magistralement écrite par Glukhovsky. Entre factions politiques, fanatisme religieux et ceux qui ne croient plus en rien, le livre rend réel le monde post-apocalyptique qui nous est proposé. Le fait de ne pas vraiment savoir ce qui a lancé la guerre nucléaire (elle n’est évoqué que par quelques survivants) permet de se concentrer sur le plus important : l’univers du métro. Cependant, Artyom monte quelque fois à la surface et la description qui en est faite est tout à fait saisissante. De plus, la menace que font planer les mutants apparaît toujours en filigrane, ajoutant une tension de tous les instants. En fait, il est très intéressant de voir à quel point cet univers post-apocalyptique nous paraît plausible et réel. C’est ce qui fait le sel de Metro 2033 et qui en fait un excellent livre, que je recommande tout particulièrement.
Le plus compliqué est peut-être de se retrouver parmi les noms des stations, pour qui n’est pas familier avec le réseau moscovite. Pas de panique, deux plans (en couleur, bel effort à signaler) sont proposés et permettent de facilement situer l’action et d’avoir un aperçu de l’état des forces en présence. Vous ne serez donc pas complètement livrés à vous-même à travers votre exploration.
Si le livre est sorti dès 2005 en Russie, connaissant un succès immense, il a fallu attendre 2010 pour une traduction française. La raison en est très simple : c’est cette même année que le studio 4A Games a adapté le livre dans un jeu vidéo éponyme et, de mon point de vue, tout à fait réussi. S’il ne reprend pas exactement toute l’histoire du livre, s’en démarquant à de nombreux moments, il en est néanmoins très lié et lire le livre permet de comprendre de nombreuses choses dans le jeu. En bref, si vous comptez vous lancer dans le jeu, je vous conseille d’abord la lecture de Metro 2033.