Remarqué avec Le second disciple , polar en territoire molenbeekois autour de la question du terrorisme, le Bruxellois Kenan Görgün s’éloigne un instant du filon sociétal et livre le portrait - très malin - d’un homme si fatigué de son épouse qu’il a décidé de l’éliminer. Derrière ce pitch rudimentaire, on trouve l’histoire d’un couple pourri de l’intérieur mais qui ce soir, dans sa maison chic de New York, se laisse aller à fêter la Saint-Valentin au rythme de chansons sexy et jusqu’à l’accident… Pigiste occasionnel, Stan est un écrivain qui n’écrit rien et attend toujours d’être traversé par le talent qu’il n’a pas. Susannah est une brillante architecte d’intérieur qui multiplie le succès et fait tourner la baraque.
Dans un style cash et cru, Kenan Görgün sonde le cerveau d’un homme qui ne supporte plus d’être le minable de l’histoire, ce qu’il est vraiment, incapable même de “réussir” le meurtre de sa femme. Dans un texte qui provoque parfois le malaise, l’histoire cite les codes de la comédie romantique mais déjoue les pronostics de légèreté en pointant la domination masculine comme phénomène responsable de la violence faite aux femmes. L’insondable bêtise d’un loser - même pas magnifique - par un auteur qui n’emprunte pas les voies encombrées du polar mainstream.